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Analyse des Baluns et Ununs en radiofréquence : Principes, différences et applications, tout un monde…

Mis à jour le : 28/08/2025 à 11:21


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Le rôle crucial de l’interface dans les systèmes d’antennes

Ce rapport présente une analyse exhaustive et rigoureuse des dispositifs d’interface en radiofréquence (RF), en particulier les baluns et les ununs. L’objectif est de dépasser les définitions superficielles pour fournir une compréhension profonde de leurs principes de fonctionnement, de leurs différences fondamentales et de leurs applications critiques. La distinction entre les approches conceptuelles « en courant » et « en tension » sera examinée en détail, car elle constitue le cœur de la problématique pour une sélection et une utilisation optimales de ces composants.

Problématique centrale

La connexion, en apparence simple, entre une antenne et sa ligne de transmission (typiquement un câble coaxial) est le siège de phénomènes électromagnétiques complexes. Une interface mal conçue ou mal gérée peut dégrader radicalement les performances globales d’un système radio, même si l’antenne et l’émetteur-récepteur sont de la plus haute qualité.1 Sans une interface appropriée, l’efficacité du système est compromise, le bruit de réception augmente et des interférences peuvent être générées.

Pour résoudre ces problématiques d’interface, deux familles principales de dispositifs sont utilisées :

    • Le Balun, contraction de BALanced-to-UNbalanced (symétrique à asymétrique), est un dispositif de transition de mode. Sa fonction première est d’interfacer une charge ou une ligne symétrique, comme une antenne dipôle, avec une ligne de transmission asymétrique, comme un câble coaxial.
    • L’Unun, contraction de UNbalanced-to-UNbalanced (asymétrique à asymétrique), est un transformateur d’impédance qui opère exclusivement au sein de systèmes asymétriques. Il ne réalise pas de conversion de mode.

La compréhension de ces composants est essentielle pour tout opérateur radio ou ingénieur RF souhaitant optimiser son installation, protéger son équipement et assurer une transmission de signal fiable et efficace.


Lignes de transmission symétriques (équilibrées)

Définition et structure

Une ligne de transmission symétrique, ou équilibrée, est constituée de deux conducteurs parallèles qui présentent des impédances égales par rapport à un plan de référence commun, généralement la masse ou l’environnement électromagnétique environnant. Les exemples les plus courants sont la ligne bifilaire (ou « twin-lead ») et l’échelle à grenouille (ou « ladder line »).

Mode différentiel

Dans une ligne symétrique, le signal utile est transporté en mode différentiel. Cela signifie que le signal est défini par la différence de potentiel entre les deux conducteurs. Dans des conditions idéales, les courants circulant sur chaque conducteur sont de même amplitude mais de phase exactement opposée (un déphasage de 180 degrés). La somme vectorielle des courants en tout point de la ligne est donc nulle.

Immunité au bruit

L’un des avantages majeurs des lignes symétriques est leur immunité intrinsèque au bruit. Les champs électromagnétiques externes (interférences) induisent des tensions parasites sur les deux conducteurs. En raison de leur géométrie symétrique, ces tensions induites sont de même phase et de même amplitude sur chaque conducteur ; on parle de signal de mode commun.9 Un récepteur connecté à une ligne symétrique est conçu pour ne répondre qu’à la différence de potentiel entre les conducteurs (le mode différentiel). Par conséquent, le bruit de mode commun, étant identique sur les deux conducteurs, est en grande partie annulé par le récepteur.

Lignes de transmission asymétriques (déséquilibrées)

Structure du câble coaxial

La ligne de transmission asymétrique la plus répandue est le câble coaxial. Sa structure est fondamentalement différente de celle d’une ligne symétrique. Elle se compose d’un conducteur central, appelé l’âme, entouré d’un diélectrique, lui-même enveloppé par un conducteur externe cylindrique, la gaine ou le blindage.

Référence à la masse

Dans un système asymétrique, un des conducteurs est directement connecté à la masse du système. Dans le cas du câble coaxial, c’est la gaine qui joue ce rôle. Le signal RF est défini comme la différence de potentiel entre l’âme et la gaine. Cette configuration est dite « asymétrique » car les impédances de l’âme et de la gaine par rapport à l’environnement extérieur sont très différentes.

Confinement du signal

Dans des conditions de fonctionnement idéales, le courant qui circule sur l’âme est exactement égal en amplitude et opposé en phase au courant qui circule sur la face intérieure de la gaine. Grâce à l’effet de peau, les champs électromagnétiques générés par ces deux courants opposés sont confinés à l’intérieur du câble, dans l’espace diélectrique. Idéalement, aucun champ ne s’échappe à l’extérieur, ce qui empêche la ligne de rayonner et la rend insensible aux interférences externes.

Le phénomène des courants de mode commun

Définition

Un courant de mode commun est un courant qui ne respecte pas l’équilibre idéal d’une ligne de transmission. Il est défini comme un courant qui circule dans la même direction et avec la même phase sur les deux conducteurs d’une ligne symétrique, ou, ce qui est plus pertinent pour notre analyse, sur la face extérieure de la gaine d’un câble coaxial. Ce courant n’a pas de courant de retour opposé à proximité immédiate pour annuler son champ magnétique.

Origine à l’interface antenne/ligne

Le problème des courants de mode commun se manifeste de manière critique lorsqu’une ligne asymétrique (coaxial) est connectée directement à une charge symétrique (comme une antenne dipôle). Le système, naturellement symétrique du côté de l’antenne, est forcé dans un état asymétrique par la connexion du coaxial. La gaine du câble est connectée à un des brins du dipôle, tandis que l’âme est connectée à l’autre. Le système tente alors de se rééquilibrer en permettant à une partie du courant RF de s’écouler non pas à l’intérieur de la gaine, mais sur sa surface extérieure. La gaine du câble coaxial devient ainsi, de fait, un troisième élément rayonnant, en plus des deux brins de l’antenne.

Il est fondamental de comprendre que la cause première de ce phénomène n’est pas une désadaptation d’impédance, mais une rupture de la symétrie des courants. Par exemple, un dipôle présentant une impédance de 50 ohms connecté à un câble coaxial de 50 ohms est parfaitement adapté en termes d’impédance. Cependant, sans dispositif de symétrisation, ce système souffrira inévitablement de courants de mode commun en raison de l’incompatibilité structurelle entre la ligne asymétrique et la charge symétrique. La fonction première et non négociable d’un balun est donc la gestion de cette symétrie des courants, la transformation d’impédance étant une fonction additionnelle mais conceptuellement distincte.

Conséquences néfaste

Les courants de mode commun sont la source de nombreux problèmes dans un système d’antenne :

  • Rayonnement de la ligne de transmission : Le courant circulant sur l’extérieur de la gaine fait que la ligne d’alimentation elle-même rayonne de l’énergie RF, comme si elle était une partie de l’antenne. Cela entraîne une perte de puissance qui n’est pas dirigée dans la direction souhaitée.
  • Distorsion du diagramme de rayonnement : Le rayonnement de la ligne d’alimentation se combine avec celui de l’antenne, ce qui déforme le diagramme de rayonnement théorique. Les lobes de rayonnement peuvent être altérés, et des nuls peuvent apparaître dans des directions inattendues.
  • Augmentation du bruit en réception : Le phénomène est réciproque. En réception, la gaine du coaxial agit comme une antenne qui capte les bruits électromagnétiques locaux (provenant d’appareils électroniques, d’alimentations à découpage, etc.). Ce bruit est ensuite injecté directement dans le récepteur, ce qui dégrade le rapport signal/bruit et diminue la capacité à entendre les signaux faibles.
  • Retour RF dans la station : Les courants RF qui parcourent l’extérieur de la ligne d’alimentation peuvent remonter jusqu’à l’équipement dans la station radio. Cela peut causer des dysfonctionnements des appareils, des interférences avec d’autres équipements (ordinateurs, microphones), et même présenter un risque de brûlures RF pour l’opérateur.

Le Balun – Interface entre mondes symétrique et asymétrique

Le balun est le dispositif conçu spécifiquement pour résoudre les problèmes d’incompatibilité entre les systèmes symétriques et asymétriques.

Définition et fonctions primaires du balun

Acronyme et fonction

Comme son nom l’indique (BALanced-to-UNbalanced), la fonction d’un balun est de réaliser une transition propre entre un circuit symétrique et un circuit asymétrique. C’est un dispositif à trois ports : un port asymétrique (généralement une entrée coaxiale) et deux ports qui forment une sortie symétrique. Idéalement, il convertit un signal d’entrée asymétrique en deux signaux de sortie d’amplitude égale et de phase opposée (180°).

Bidirectionnalité

Le balun est un dispositif passif et réciproque. Il fonctionne de manière identique dans les deux sens : de asymétrique vers symétrique lors de l’émission, et de symétrique vers asymétrique lors de la réception.

Double objectif

Les fonctions d’un balun peuvent être résumées en deux objectifs principaux :

  1. Transition de mode : Assurer la conversion correcte de la structure du signal entre les deux types de lignes.
  2. Suppression du mode commun : Sa fonction la plus critique est de présenter une impédance très élevée aux courants de mode commun (les courants de gaine) afin de les bloquer ou de les « étrangler », tout en restant transparent pour les courants de mode différentiel (le signal utile).

Le balun en courant (Type Guanella)

Principe de fonctionnement : Forcer l’égalité des courants

Le balun en courant, souvent associé au nom de son inventeur Gustav Guanella, est conçu pour atteindre un objectif principal : forcer les courants sortant de ses deux bornes symétriques à être rigoureusement égaux en amplitude et opposés en phase. Il atteint cet objectif indépendamment des impédances présentées par chaque branche de la charge connectée.

La supériorité de cette approche découle directement de la physique fondamentale des antennes. Le rayonnement électromagnétique est généré par l’accélération des charges, c’est-à-dire par le courant qui circule dans les conducteurs de l’antenne. Pour qu’une antenne symétrique comme un dipôle fonctionne correctement, les courants dans ses deux moitiés doivent être équilibrés. Le balun en courant se concentre sur le contrôle direct de ce paramètre fondamental. En forçant la symétrie des courants, il garantit que l’antenne rayonne comme prévu, même si cela implique que les tensions à ses bornes doivent s’ajuster de manière asymétrique pour compenser les imperfections de la charge (dues à l’environnement proche, par exemple).

Construction

  • Self de choc (« Choke Balun ») : La forme la plus simple et la plus pure conceptuellement est la self de choc, ou « choke balun ». Elle consiste à enrouler le câble coaxial sur plusieurs spires pour former une bobine. Cet enroulement crée une inductance qui présente une impédance élevée au passage du courant sur la surface extérieure de la gaine, l’étranglant efficacement. Ce type de balun, souvent appelé « balun à air », est le plus simple à réaliser mais son efficacité est limitée à une bande de fréquences relativement étroite.Il ne fait qu’une seule chose : bloquer le mode commun, sans aucune transformation d’impédance. C’est le bloc de construction fondamental de tous les baluns en courant.
  • Enroulements sur noyau de ferrite : Pour obtenir une impédance de choc élevée sur une large bande de fréquences, le câble coaxial ou des fils bifilaires sont enroulés sur un noyau magnétique, généralement un tore de ferrite.27 La haute perméabilité de la ferrite augmente considérablement l’inductance pour un nombre de spires donné, ce qui permet de construire des baluns compacts et très efficaces sur toute la gamme des ondes courtes (HF). C’est la base du balun de Guanella.

Analyse de l’efficacité

Le balun en courant est extrêmement efficace car il s’attaque directement à la cause du rayonnement de la ligne : le déséquilibre des courants. En forçant cet équilibre, il permet aux tensions aux bornes de sortie de « flotter » pour s’adapter à la charge. Cette caractéristique le rend très tolérant aux antennes imparfaitement symétriques que l’on rencontre dans le monde réel, ce qui en fait le choix privilégié pour l’alimentation des antennes.

Le Balun en tension (Type Ruthroff)

Principe de fonctionnement : Forcer l’égalité des tensions

Le balun en tension, souvent associé au modèle de C. L. Ruthroff, fonctionne sur un principe différent. Il utilise une action de transformateur ou d’autotransformateur pour garantir que les tensions à ses bornes de sortie sont égales en amplitude et opposées en phase par rapport à la masse de l’entrée asymétrique.

Construction

La construction typique d’un balun en tension repose sur un transformateur avec des enroulements primaire et secondaire, ou plus communément sur un autotransformateur où une seule bobine est utilisée avec des prises intermédiaires. Le modèle de Ruthroff utilise une ligne de transmission unique (par exemple, un fil bifilaire) connectée de manière à ce que la tension d’entrée soit appliquée sur les deux enroulements en série, tandis que la tension de sortie est prélevée aux bornes d’un seul enroulement, créant ainsi une transformation de tension et d’impédance.

Limites fondamentales

Le balun en tension présente des inconvénients majeurs lorsqu’il est utilisé pour alimenter des antennes :

  • Il ne garantit l’équilibre des courants que si, et seulement si, les impédances de charge de chaque côté de l’antenne sont parfaitement identiques et purement résistives.
  • Dans une situation réelle, une antenne est rarement parfaitement symétrique. La proximité d’un bâtiment, d’un arbre ou du sol peut rendre les impédances de ses deux brins légèrement différentes. Dans ce cas, un balun en tension forcera des tensions égales sur des impédances inégales. Conformément à la loi d’Ohm (), cela créera inévitablement des courants inégaux, ce qui génère un courant de mode commun résiduel et donc un rayonnement de la ligne d’alimentation.
  • Par sa conception, il offre une très faible isolation de mode commun, ne résolvant que partiellement le problème qu’il est censé corriger.

Analyse comparative et critères de sélection : Courant vs Tension

 Verdict : Pour l’alimentation d’antennes, où la charge est rarement parfaitement symétrique et où l’objectif principal est d’éliminer le rayonnement de la ligne et le bruit induit, le balun en courant est presque toujours le choix supérieur et recommandé. Il est plus robuste, plus tolérant et s’attaque au paramètre physique fondamental du rayonnement : le courant.

Quand utiliser un balun en tension?

L’utilisation d’un balun en tension est plus pertinente dans des applications de circuits RF contrôlés, où les impédances de charge sont bien définies et symétriques, et où la transformation d’impédance est la fonction première. On les trouve par exemple dans des mélangeurs doublement équilibrés ou des amplificateurs « push-pull ». Pour les antennes HF et VHF, son usage est généralement déconseillé.


L’Unun – Transformateur d’impédance pour lignes asymétriques

L’unun est un dispositif souvent confondu avec le balun, mais son rôle et sa philosophie de conception sont radicalement différents.

Définition et rôle spécifique de l’Unun

Acronyme et fonction

Le terme Unun est une contraction de UNbalanced-to-UNbalanced. Il s’agit d’un transformateur RF conçu spécifiquement pour adapter l’impédance entre deux circuits asymétriques, par exemple entre un câble coaxial de 50 ohms et une antenne asymétrique présentant une impédance différente.

Fonction unique : Adaptation d’impédance

Contrairement au balun, la fonction de l’unun est uniquement l’adaptation d’impédance. Il ne réalise aucune conversion de mode symétrique/asymétrique. Son entrée et sa sortie sont toutes deux asymétriques.

Distinction structurelle clé

La différence fondamentale est visible sur le schéma de câblage. Un unun possède une connexion de masse commune entre son entrée et sa sortie. Une des bornes de sortie est directement et galvaniquement connectée à la gaine du câble coaxial d’entrée. Ce n’est jamais le cas pour un balun, dont les deux bornes de sortie symétriques sont « flottantes » ou isolées par rapport à la masse de l’entrée.

Cette différence de conception a des implications profondes. Alors qu’un balun a pour but d’isoler la ligne d’alimentation de l’antenne pour empêcher les courants de gaine, un unun intègre la ligne d’alimentation (et son système de masse/contrepoids) dans le circuit global de l’antenne. Le chemin de retour du courant de l’antenne est délibérément la gaine du coaxial et le système de masse de la station. Par conséquent, un unun ne peut pas « supprimer » les courants de mode commun ; ces courants font partie intégrante du fonctionnement de l’antenne asymétrique qu’il alimente. Le défi n’est plus d’éliminer ces courants, mais de leur fournir un chemin de retour contrôlé et de basse impédance via un bon système de prise de terre ou de contrepoids, afin d’éviter qu’ils ne remontent jusqu’à la station. Ce sont des philosophies de conception diamétralement opposées.

Conception et ratios de transformation

L’Unun comme autotransformateur

La grande majorité des ununs sont construits comme des autotransformateurs. Ils consistent en un seul enroulement bobiné sur un noyau de ferrite, avec des prises pour l’entrée et la sortie qui déterminent le rapport de transformation

Principe de transformation

La transformation d’impédance d’un transformateur idéal est proportionnelle au carré du rapport du nombre de spires () entre la sortie et l’entrée.

La relation fondamentale qui régit la transformation d’impédance dans un transformateur idéal est la suivante : Zp / Zs = (Np / Ns)²

Où :

  • Zp est l’impédance vue du côté primaire du transformateur.
  • Zs est l’impédance de la charge connectée au côté secondaire.
  • Np est le nombre de spires de l’enroulement primaire.
  • Ns est le nombre de spires de l’enroulement secondaire.

Le rapport Np / Ns est appelé le rapport de transformation (m). La formule peut donc aussi s’écrire : Zp = m² * Zs

Explication

Cette formule montre que l’impédance vue du primaire (Zp) est égale à l’impédance de la charge au secondaire (Zs) multipliée par le carré du rapport de transformation.

  • Si le nombre de spires au primaire est supérieur à celui du secondaire (Np > Ns), le rapport de transformation m > 1. Le transformateur est un abaisseur de tension, mais un élévateur d’impédance.
  • Si le nombre de spires au primaire est inférieur à celui du secondaire (Np < Ns), le rapport de transformation m < 1. Le transformateur est un élévateur de tension, mais un abaisseur d’impédance.

Ratios courants et justification

Différents ratios sont utilisés pour s’adapter aux impédances caractéristiques de divers types d’antennes asymétriques :

  • 1:4 (ou 4:1) : Correspond à un rapport de spires de 1:2. Utilisé pour adapter une impédance de 200 ohms à 50 ohms, ou inversement.
  • 1:9 (ou 9:1) : Correspond à un rapport de spires de 1:3. C’est le ratio le plus courant pour les antennes « long-fil » ou « random wire », qui présentent une impédance de l’ordre de 450 ohms. L’unun ramène cette impédance à 50 ohms, dans une plage gérable par une boîte de couplage.
  • 1:49 (ou 49:1) / 1:64 (ou 64:1) : Correspondent à des rapports de spires de 1:7 et 1:8. Ces ununs à fort ratio sont spécifiquement conçus pour les antennes demi-onde alimentées en extrémité (« End-Fed Half-Wave » ou EFHW). Ces antennes présentent une impédance très élevée, de l’ordre de 2500 à 4000 ohms, à leur point d’alimentation. L’unun permet de ramener cette impédance à une valeur proche de 50 ohms, rendant l’antenne directement utilisable sans boîte de couplage sur ses fréquences de résonance.

Tableau comparatif synthétique : Balun en courant, balun en tension, et Unun

Caractéristique Balun en Courant (Guanella) Balun en Tension (Ruthroff) Unun (Autotransformateur)
Fonction principale Transition de mode ET suppression du mode commun Transition de mode ET transformation d’impédance Transformation d’impédance UNIQUEMENT
Type de transition Symétrique <-> Asymétrique Symétrique <-> Asymétrique Asymétrique <-> Asymétrique
Principe de fonctionnement Force des courants égaux et opposés Force des tensions égales et opposées Transformation de tension/courant via autotransformateur
Efficacité Mode commun Très élevée (isole la ligne) Faible (sensible au déséquilibre de charge) Nulle (ne traite pas le mode commun)
Connexion à la masse Sortie symétrique flottante (isolée) Sortie symétrique référencée à la masse Sortie asymétrique partage la masse de l’entrée
Application typique Dipôles, Yagis, Boucles (antennes symétriques) Circuits RF internes (mélangeurs), déconseillé pour antennes End-Fed, Long-wire, Verticales (antennes asymétriques)
Avantages Excellente balance, robuste aux imperfections, supprime le bruit Conception simple pour la transformation d’impédance Efficace pour l’adaptation de fortes impédances
Inconvénients Peut être plus complexe pour les forts ratios d’impédance Mauvaise performance avec des charges réelles, génère du mode commun Nécessite un bon système de masse/contrepoids, n’isole pas la ligne

Applications pratiques, mise en œuvre et recommandations

Cette dernière partie a pour but de traduire la théorie en conseils pratiques et applicables pour des scénarios d’installation réels.

Utilisation des baluns dans les systèmes d’antennes symétriques

Antennes Dipôles et Yagi

  • Application : Une antenne dipôle demi-onde classique en espace libre présente une impédance d’environ 73 ohms à son point d’alimentation. Un dipôle configuré en V inversé voit son impédance abaissée à une valeur proche de 50 ohms. Les antennes Yagi sont également des charges symétriques.
  • Recommandation : L’utilisation d’un balun en courant 1:1 est la norme. Sa seule fonction est de bloquer les courants de gaine et d’assurer une alimentation parfaitement symétrique des deux éléments de l’antenne, maximisant ainsi l’efficacité et préservant le diagramme de rayonnement.

Antennes boucle et dipôles repliés

  • Application : Ces types d’antennes symétriques présentent une impédance native plus élevée. Un dipôle replié a une impédance d’environ 300 ohms, et une boucle quad ou delta loop a une impédance autour de 200-300 ohms.
  • Recommandation : Un balun en courant 4:1 est requis. Il réalise simultanément deux fonctions essentielles : la transformation d’impédance (par exemple, de 200 ohms à 50 ohms) et la symétrisation des courants pour éliminer le mode commun.

Considérations de mise en œuvre

  • Positionnement : Pour être efficace, le balun doit être placé au plus près possible du point d’alimentation de l’antenne.
  • Protection contre les Intempéries : Le balun étant un élément exposé, il doit être logé dans un boîtier étanche pour le protéger de l’humidité, des rayons UV et des variations de température, qui pourraient dégrader ses performances et sa durée de vie.
  • Robustesse Mécanique : Le boîtier du balun sert souvent de point de fixation central pour l’antenne. Il doit être mécaniquement robuste et intégrer des dispositifs de décharge de traction pour éviter que la tension mécanique des fils ne s’applique directement sur les connexions électriques.

Utilisation des Ununs pour les antennes asymétriques

Antennes « Long-Fil » et « Random Wire »

  • Application : Ces antennes, constituées d’un fil de longueur non résonnante, présentent une impédance élevée et très variable en fonction de la fréquence.
  • Recommandation : Un unun 9:1 est couramment utilisé à la base de l’antenne. Il ne garantit pas une adaptation parfaite à 50 ohms, mais il abaisse l’impédance de l’antenne dans une plage (typiquement 25-600 ohms) qui est plus facilement gérable par une boîte de couplage (tuner) située dans la station. Un système de contrepoids ou une bonne prise de terre est indispensable pour fournir un chemin de retour au courant.

Antennes « End-Fed Half-Wave » (EFHW)

  • Application : Une antenne constituée d’un fil d’une demi-longueur d’onde électrique, alimentée à son extrémité, est une charge asymétrique avec une impédance très élevée (de 2000 à 5000 ohms).
  • Recommandation : Un unun 49:1 ou 64:1 est nécessaire pour transformer cette très haute impédance à une valeur proche de 50 ohms. Ces antennes sont résonnantes et, si elles sont correctement taillées, peuvent souvent être utilisées sans boîte de couplage sur leurs bandes de fréquences fondamentales et harmoniques.

Antennes verticales

  • Application : Une antenne verticale quart d’onde classique, installée au-dessus d’un plan de sol parfait, a une impédance d’environ 36 ohms. Dans des conditions réelles, cette impédance peut varier.
  • Recommandation : Un unun peut être utilisé à la base de la verticale pour adapter cette faible impédance à 50 ohms (par exemple, un unun avec un rapport de 1:1.5). Souvent, ce dispositif d’adaptation est directement intégré dans la base des antennes commerciales.

Paramètres de performance

Le choix du noyau de ferrite

La performance d’un balun ou d’un unun dépend de manière critique du noyau de ferrite utilisé.

  • Matériau (« Mix ») : Le type de matériau de ferrite (identifié par un numéro, par ex. 43, 61, 31) détermine la plage de fréquences sur laquelle le noyau sera le plus efficace, ainsi que ses caractéristiques de perte. Un matériau adapté aux basses fréquences (ex: mix 31) peut avoir des pertes excessives aux hautes fréquences, et inversement (ex: mix 61). Un mauvais choix peut entraîner une surchauffe du noyau et une défaillance à haute puissance.
  • Géométrie et Taille : Les noyaux toroïdaux sont les plus courants. La taille du noyau (diamètre, section) doit être suffisante pour supporter la puissance d’émission désirée sans atteindre la saturation magnétique, un état où le noyau perd ses propriétés magnétiques et le dispositif cesse de fonctionner correctement.

L’ingénierie d’un balun ou d’un unun est un exercice de compromis. Un noyau à haute perméabilité est efficace à basse fréquence avec peu de spires, mais peut être moins performant en haute fréquence. Un noyau plus grand gère plus de puissance mais est plus coûteux et lourd.18 Un dispositif « large bande » utilise un matériau qui offre un compromis acceptable sur toute la plage HF, ce qui signifie qu’il ne sera pas nécessairement optimal à une fréquence unique spécifique. Il n’existe pas de balun « universel parfait » ; la sélection doit être guidée par la plage de fréquences, le niveau de puissance et les performances requises.

Paramètres de performance

  • Pertes d’insertion : Tout dispositif passif introduit une certaine perte de puissance. Pour un balun ou un unun bien conçu, cette perte doit être minimale (généralement une fraction de décibel).
  • Équilibre en amplitude/phase (pour les baluns) : Ce paramètre mesure la qualité de la sortie symétrique. Un équilibre parfait correspond à des amplitudes de sortie égales et un déphasage de 180.0 degrés. Un mauvais équilibre compromet la capacité du balun à rejeter le mode commun.
  • Bande passante : La plage de fréquences sur laquelle le dispositif fonctionne conformément à ses spécifications (pertes, équilibre, ROS).

Conclusion : Synthèse et guide pour l’Opérateur « éclairé »

Résumé des distinctions

L’analyse détaillée des baluns et ununs permet de distiller leur essence en quelques principes fondamentaux :

  • Balun = Symétrie. Sa mission principale est de gérer la transition entre un monde symétrique (l’antenne) et un monde asymétrique (le câble coaxial), en assurant l’équilibre des courants.
  • Unun = Impédance. Sa mission est exclusivement de faire correspondre des impédances différentes au sein d’un monde purement asymétrique.
  • Courant > Tension. Pour l’alimentation des antennes, le contrôle des courants est le paramètre primordial pour garantir un fonctionnement correct et minimiser les interférences. Le balun en courant est donc le choix technique par défaut.

Aide-mémoire pour la sélection

Le choix du dispositif approprié peut être simplifié par une série de questions logiques :

  1. Mon antenne est-elle de nature symétrique (ex: dipôle, boucle, Yagi) ? → J’ai besoin d’un BALUN.
  2. Mon antenne est-elle de nature asymétrique (ex: end-fed, verticale, long-fil) ? → J’ai besoin d’un UNUN.
  3. Si j’ai besoin d’un BALUN, l’impédance de mon antenne est-elle proche de 50 ohms ? → Balun en courant 1:1.
  4. Si j’ai besoin d’un BALUN, l’impédance est-elle significativement différente (ex: 200 ohms) ? → Balun en courant avec le ratio d’impédance adéquat (ex: 4:1).
  5. Si j’ai besoin d’un UNUN, quel est le ratio d’impédance requis par mon antenne ? → Choisir l’unun avec le ratio approprié (ex: 9:1, 49:1, etc.).

Pour conclure :

L’optimisation d’un système d’antenne ne s’arrête pas au choix de l’antenne elle-même. La compréhension et la sélection judicieuse du dispositif d’interface sont des étapes non négociables pour atteindre les performances maximales. Un balun ou un unun de qualité, correctement choisi et installé, permet de réduire les pertes, de minimiser le bruit en réception, d’éliminer les retours RF et de garantir que l’antenne rayonne l’énergie de manière efficace et prévisible. En somme, un bon dispositif d’interface n’est pas un luxe, mais une nécessité fondamentale pour le fonctionnement propre et performant de toute station radio.